Un industriel novateur

Le fabuleux destin d’Alexandre Bornibus, issu d’une famille marnaise modeste, se dessine en 1846. Alors âgé de 25 ans, il sait qu’il ne travaillera pas dans la boucherie de ses aïeux à Gyé-sur-Seine. Son frère aîné Joseph l’entraîne alors avec lui dans le rêve d’une vie meilleure.

Les deux frères choisissent de s’établir à Pontoise. Ils fondent l‘Institution Bornibus", une école primaire avec internat au sein de la "propriété Saint-Jacques’’dans l'actuelle rue Pierre-Butin.

Alexandre Bornibus y sera un instituteur renommé durant six ans, avant de choisir de se reconvertir. Esther Chéron, la fille de négociants pontoisiens qu’il épouse en 1854, le guide en effet dans une nouvelle aventure qui sera couronnée de succès.

Le Pontoisien d’adoption devient laitier, puis moutardier. Il reprend la société Touaillon, au cœur des Halles, avant de fonder sa propre entreprise, dans le quartier parisien de La Villette.

La moutarde n’est alors qu’un condiment fabriqué en petite quantité. Une situation qui change sous l’impulsion de Bornibus. La clé de sa réussite tient à ses efforts en matière d’innovation, notamment pour modiier les ustensiles employés de longue date dans la fabrication de la moutarde de Dijon.

En mars 1864, le fabricant pontoisien dépose ainsi un brevet, "un moyen de tamiser la moutarde et lui permettre de supporter les voyages au long cours". Dans un article paru en 1869, ‘‘Le Petit Journal’’ lui reconnaît le mérite d’avoir fait pénétrer la moutarde dans tous les ménages… bien avant Maille !

Un pionnier de la publicité

L’industriel devient un mythe au sein de son entreprise. Chaque année, il donne une journée à ses employés qui partent tous ensemble dans les voitures de l’entreprise pour un plantureux repas à la campagne…accompagné bien entendu d’une bonne moutarde !

Sa popularité est également renforcée par d’habiles campagnes de communication et de publicité, parmi les premières en France. En 1878, Etienne Ducret écrit ‘‘La Bornibusiade’’, un opuscule de 32 pages tout à la gloire de la moutarde d'Alexandre Bornibus.

Plus tard, en 1900, le fameux cinéaste Georges Méliès (le créateur des premiers trucages et effets spéciaux du septième art), réalisera un court métrage publicitaire dans lequel les clients d’un restaurant se disputent les pots de moutarde Bornibus, tant elle est savoureuse.  

En 20 ans, grâce à sa moutarde, Alexandre Bornibus obtient une quarantaine de médailles lors de grandes expositions et de concours internationaux  prestigieux. Il meurt en 1882 à la tête d’une entreprise florissante et d’une fortune de 600 000 francs.

En 1873, le dernier ouvrage posthume d’Alexandre Dumas, le “Grand dictionnaire de cuisine”, est lu tel un best-seller. Le tout-Paris veut découvrir les 3 000 recettes préconisées par l’auteur. Parmi les grands noms plébiscités dans cette œuvre figure Alexandre Bornibus, considéré par le romancier comme le meilleur moutardier de France.

Mais avant cette reconnaissance nationale, peu savent que l'aventure de cet artisan a débuté à Pontoise...

Infos pratiques

Le saviez-vous ?

Bernard Pharisien a publié un ouvrage ("Bornibus le Champenois", éditions Némont, juillet 2011) sur ce grand moutardier, contemporain de Maille et de Bordin.

L’auteur, descendant direct de ce talentueux entrepreneur, précise que la "Moutarde Bornibus" a continué d’être fabriquée et vendue grâce à la famille de Charles Boubli de 1925 à 1992 puis la société Agrodor, implantée à Dormans (Marne), jusqu’en 2012.

Actuellement, la marque attend un repreneur.